2016-04-19 19:03:00

Cardinal Vegliò : à Lesbos, le Pape a voulu donner un signe concret au monde


(RV) Une nouvelle tragédie frappe la mer Mediterranée, peu de temps après la visite du Pape François au camp de réfugiés de Lesbos. Les informations restent parcellaires et confuses, mais 200 à 300 migrants essentiellement somaliens auraient péri lundi 18 avril au large de l’Égypte. Le cardinal Antonio Maria Vegliò, président du Conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement, est revenu sur l’ampleur de ce drame, dans une interview à Fabio Colagrande, du service italien de Radio Vatican.

«Malheureusement, le martyre dans la Méditerranée recommence. Une fois barrée la route des Balkans, les flux retournent en Méditerranée. Et dans cette mer, malheureusement, nous sommes habitués à cette tragique réalité : que beaucoup partent et que tous n’arrivent pas. Cette dernière nouvelle le démontre, justement. Face à ce qui advient, que peut-on faire ? C’est une grande tristesse. Prier, en espérant que l’Europe les reçoive avec plus de générosité. Ceux-ci sont déjà morts en venant. Les pauvres ! Ils sont victimes des criminels dans ces bateaux indécents, qui ne devraient même pas naviguer, et qui sont chargés de pauvres personnes.

Quel a été, selon vous, le sens le plus fort, le plus important, de ce qui est arrivé samedi à Lesbos, de cette visite du Pape ?

Je crois, comme toujours, que quand le Pape se déplace, c’est un signe concret qu’il veut donner au monde. Que veut dire ce voyage à Lesbos ? Que voulait dire le voyage à Lampedusa ? Il veut dire que l’Église est proche des migrants, des réfugiés, qu’elle ne les laisse jamais seuls. Ces gestes, ces actions impressionnent, parce qu’il est l’unique leader au monde, je peux le dire, qui peut faire ces choses. Non seulement qui peut les faire, mais qui les fait ! Ensuite, cela remet au premier plan le phénomène migratoire. Comment pouvons-nous le résoudre ? Un autre aspect que le Pape a souligné, c’est qu’il ne s’agit pas de choses, de colis postaux, de nombres, mais de personnes, et que ces solutions doivent garantir toujours le respect, le soin et la dignité de ceux qui, pauvres, sont contraints à migrer.

François a expliqué que son voyage a été un voyage humanitaire. Et pourtant beaucoup y voient aussi un signe politique fort dans le contexte européen. Cette lecture est juste ?

C’est certes un acte humanitaire. Quand le Pape fait ces appels, ces gestes, il le fait surtout en faveur de ceux qui souffrent, de l’humanité souffrante. Qu’ensuite son voyage, ses paroles, prennent aussi un sens politique, cela me semble aussi normal et juste. Certes, en ce moment c’est un signe, je crois, précis, pas seulement pour le monde entier, pour qu’il soit plus sensible au monde des migrations, mais justement directement à l’Europe : c’est comme une secousse pour l’Europe. Dans le camp de réfugiés de Lesbos, le Pape a dit qu’il y a avait de quoi pleurer, parce qu’il y a trop de ghettos, et il a dit de prendre en charge cette catastrophe, qui est la plus grave et la plus grande depuis la Seconde guerre mondiale. Moi je me souviens que quand il est allé à Lampedusa, il y a quelques années, l’Europe était absente, on peut dire. Après Lampedusa, aussi grâce à l’action de l’Italie, l’Europe a commencé à penser plus concrètement à ce problème des migrations. Maintenant, avec Lesbos, encore plus, parce que c’est de nouveau un signe fort. Nous espérons que ceux qui doivent écouter écoutent.

Justement en ce moment, à Bruxelles, est examiné par les ministres de la Défense et des Affaires étrangères de l’UE un plan italien pour revoir un peu l’approche des politiques migratoires, surtout revoir l’accord entre l’Union européenne et la Turquie. Il y a beaucoup à faire encore…

Peut-être que l’Europe se sent plus consciente de devoir agir avec responsabilité. Mias quand on pense à ce qui a été fait, on ressent un peu de mélancolie. L’an dernier, les pays européens s’étaient engagés à prendre 160 000 réfugiés, avec un quota par pays. Je crois qu’ils n’en ont pris que quelques dizaines de milliers, moins de 100 000. Cela donne à réfléchir. Mais le fait qu’ils se réunissent, qu’ils discutent, c’est déjà positif. Il vaut mieux discuter d’une chose que de ne pas en parler.

Le geste du Pape, qui a choisi de porter avec lui, depuis Lesbos, trois familles musulmanes, a beaucoup marqué. Qu’est-ce que le Pape a voulu démontrer, avec ce signe concret ?

Il a voulu démontrer que les problèmes ne se résolvent pas avec des bavardages, avec des mots, qui servent et sont nécessaires, mais que c’est aussi beau quand on passe de la théorie à l’action. Qu’ils soient musulmans ou chrétiens, en ce moment cela n’a pas de particulière importance.

(CV-Service italien de Radio Vatican)

 








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